LA SECONDE GUERRE MONDIALE


Après l'annexion de l'Autriche par l'Allemagne, le Sokol de Paris organisa une grande manifestation dans la salle de la Mutualité en juin 1938 dans le but d'attirer l'attention des Français sur le danger qui menaçait la Tchécoslovaquie. Les invitations envoyées atteignirent le chiffre record de 25 000, l'affluence dépassa les 3 000 personnes, beaucoup ne trouvant pas de places. Une des premières stations de radio privées, Radio Cité, retransmit le programme.

Le Sokol de Paris participa au Xème Slet à Prague au mois de juillet 1938 en grand nombre. Au retour, le moniteur en chef Karel Tichý organisa un entraînement militaire pour préparer les hommes à la guerre si la Tchécoslovaquie fut attaquée.

Après l'occupation de la Tchécoslovaquie le 15 mars 1939, une nouvelle manifestation du Sokol de Paris dans la salle Pleyel réunit 2 000 invités. Le terrain à Gournay servait en ce temps de camp pour les Tchécoslovaques qui fuyaient leur patrie en vue de gagner l'Angleterre. La pièce de théatre "Le monde où l'on mendie" d'Edmond Konrád fut présentée par les Sokols le 17 juin 1939 au Centre Marcelin Berthelot à Paris, la mise en scène étant assurée et le rôle principal joué par le grand acteur du Théâtre National de Prague Hugo Haas.


Le télégramme adressé de Londres au Sokol de Paris le 21 septembre 1939 :

"Chers frères, au moment où vous entrez de nouveau dans le combat pour la libération de notre patrie, je me remémore nos contacts cordiaux durant la guerre de 1914-1918. Les premiers volontaires sont sortis de vos rangs et vous avez été les premiers à résister en France. Aujourd'hui vous portez de nouveau en tête des autres, le drapeau sokol. Je vous remercie et vous souhaite le succès final. Nous vaincrons, comme nous avons vaincu en 1918.

Dr Edvard Beneš


Les membres du Sokol de Paris, suivant l'exemple de leurs aînés, s'engagèrent comme volontaires et se retrouvèrent à Agde avec les autres Tchèques et Slovaques mobilisés, où ils suivaient une instruction militaire. Ils reçurent la permission d'une société gymnique locale d'utiliser sa salle et ses agrès pendant leur temps libre et de ce fait, le 7 janvier 1940, ils prirent part à une fête gymnique à Sète. Le 6 juin 1940, deux régiments d'infanterie, formés par les Tchèques et les Slovaques, partent pour le front de la Marne, mais les Allemands sont déjà sur place et immédiatement, c'est l'ordre de repli. Certains soldats tchécoslovaques furent fait prisonniers, d'autres regagnèrent Paris, quant à ceux qui retournèrent sur Agde, beaucoup prirent le chemin de l'Angleterre. Le moniteur Josef Moc, fut mortellement blessé devant un pont sur le Cher, quinze autres membres du Sokol de Paris trouvèrent la mort entre 1939 et 1945.

A Paris, en juillet 1940, trois membres de la Gestapo vinrent arrêter François Fiedler et l'emmenèrent à la prison de la Santé. Il y passa cinq mois d'interrogatoires par un officier hitlérien pragois et il dut s'expliquer sur tous ses écrits d'avant-guerre, violemment anti-militaristes et antinazis, signés "Fiedler contre Hitler". Quand ils le relâchèrent, ils lui conseillèrent de se tenir tranquille. C'était mal le connaître !

En 1941, F.Fiedler, en compagnie d'autres Sokols, entra en rapport avec des anciens combattants des Brigades Internationales d'Espagne et ensemble ils créèrent un "Comité de la Résistance Tchécoslovaque en France" dont F. Fiedler fut élu le président. L'un des membres était l'ancien secrétaire du Sokol Jiří Špánek. Au début, ils se réunissaient sur le terrain sokol de Gournay et par la suite, dans différents endroits de Paris. Les femmes participaient activement à l'action en allant chercher de fausses cartes d'alimentation, de faux papiers ou en diffusant les tracts. Une liaison était maintenue avec la Résistance française et quand un résistant demanda à Jan Lukeš d'héberger deux parachutistes, il accepta cette énorme responsabilité. Un des deux parachutistes était Karel Tichý, moniteur en chef du Sokol de Paris. Peu après leur arrivée, la Gestapo fit irruption chez J. Lukeš où par une chance inouïe, ils ne trouvèrent rien de suspect, malgré les chaussures anglaises des parachutistes restées à l'entrée.

Vers la fin du mois de juillet 1944, un Polonais, déserteur de l'armée allemande, fut arrêté par la "Feldgendarmerie", qui trouva sur lui l'adresse de F. Fiedler. Immédiatement, quatre collaborateurs français de la Gestapo vinrent chez F. Fiedler, où ils trouvèrent des tracts, prêts à être distribués, et la surveillance de l'appartement leur permit d'arrêter tout le réseau. Au lieu de remettre les prisonniers à la Gestapo, ils faisaient traîner les interrogatoires, laissant comprendre qu'ils avaient besoin d'alibis. Au bout d'un mois de détention et trois jours avant l'entrée de la 2ème D.B. du Général Leclerc dans Paris, ils furent tous relâchés. Sauvés d'une exécution probable, ils allèrent occuper les locaux de la Maison Masaryk, rue Bonaparte et de l' Ambassade Tchécoslovaque, avenue Charles Floquet.

Parmi les Forces Françaises de l'Intérieur "F.F.I." se trouvaient des membres du Sokol de Paris, comme Edouard Holeček. D'autres résistants du Sokol de Paris vécurent des évènements similaires, mais la Résistance étant très cloisonnée pour des raisons de sécurité, il est difficile de retracer le destin de chacun durant cette période. Le journaliste historien du Sokol de Paris, frère V.V. Crkal, alias Darras, membre d'un réseau de la Résistance, fut torturé par la Gestapo et jeté dans un camp de concentration d'où il sortit intellectuellement amoindri et termina ses jours dans un asile psychiatrique en Tchécoslovaquie.

Mais pour tous les autres, à Paris, la situation n'était pas pour autant brillante. En dehors de subir l'Occupation comme tous les Français, ils étaient dans une position inconfortable, officiellement le Sokol était interdit, et les Tchèques étaient considérés comme ressortissants du Protectorat allemand de Bohême-Moravie, mais en France, ils avaient combattu comme volontaires avec l'Armée française. D'où l'adoption d'une attitude de sagesse, se faire oublier de l'occupant, donc pas de réunions et surtout aucune activité de groupe et espérer que tout se passera bien.

Il n'empêche que certains, malgré les évènements, continuèrent à fréquenter régulièrement le terrain à Gournay, c'était surtout les jeunes souvent contre l'avis de leurs parents. Ils étaient assidus, il s'est ainsi formé entre eux une camaraderie à toute épreuve renforcée par un certain goût du risque, une rafle était toujours possible. Un adulte, fervent Sokol, Olda Slabý les aidait de sa présence et de son expérience, tout en maintenant l'esprit sokol. En hiver, quelques uns allaient, le dimanche, jouer au volley-ball au bois de Vincennes, apportant avec eux le filet et les piquets. Ils se réunissaient quand même et malgré tout.

A la Libération, en été 1944, quelques uns de ces jeunes sokols s'engagèrent, dans un élan patriotique, pour continuer la lutte et partirent en Angleterre former la fameuse 1ère Brigade Blindée, c'était normal pour eux, ils participèrent, entre autres combats, à la libération de la Tchécoslovaquie, certains avaient tout juste 19 ans. Leo Vlach, Ferda Klaus, André Klement étaient de ceux-là.